Inspiration et méthodes

L’esprit

Tout part d’un état d’esprit singulier ; nous l’appellerons « SSS ». Il serait très difficile à réaliser sans recours à des voies nouvelles.

J’étais un jour, il y a longtemps, en visite en un des plus significatifs musées marine du monde : Salem au Massachussetts. Je commentais un tableau avec un ami américain. Une personne derrière nous est intervenue, engageant une discussion mémorable. C’était un des directeurs du musée.  Pour lui une peinture se devait d’être « S.S.S. » ou n’existait pas. Il exposait ainsi son concept de SSS qui m’a depuis paru très important pour mes recherches. « SSS » = Striking (percutant, singulier,…); Stunning : c’est un vieux mot anglais qui vient du français « étonnant ». Ce mot vient lui même du mot « tonnerre ». J’ai toujours en mémoire comment Chardin a réussi à faire d’un banal plat de fraises un étonnant tableau. C’est bien ambitieux. ; en réalité c’est très exigeant au moment de l’inspiration et de la composition initiale. Mais le résultat en vaut la peine : être conscient de cette exigence porte en effet vers une vraie progression. Et le résultat est de provoquer une émotion plus forte chez le regard de l’autre. Il n’y a que cela qui compte. Et enfin le troisième et dernier « S » pour Subtle. ; c’est l’exigence de qualité d’exécution.

La conséquence principale est qu’il faut d’abord se forcer à une grande liberté de création. La réalité est souvent tyrannique ; il faut s’en libérer pour oser une transposition sublimée de ce réel. Cette intention est fondamentale en recherche de sujets et en réalisation. « Nous avons l’art pour ne pas mourir à la réalité » disait Nietzsche.

En principe premier dans toutes les voies nouvelles proposées ici il y a la transposition de très nombreux concepts et outils techno de ma vie pro antérieure à ma pratique en peinture. J’ai décrit ces acquis dans un texte posé ici en parallèle : Expertises pointues en organisation, anticipation-concurrences, techno, logiciels, Bases de données, ordonnancement, créativité, comme points-exemples importants de transposition.

L’inspiration

Au début il y a la phase « inspiration ». Tout repose sur un effort de construction d’une Base De Données (BDD) images très importante (50.000 images) très indexée, en permanence d’amélioration grâce à des outils de captation modernes. Le concept « sérendipité » importé des techniques de management nous aide à provoquer des fulgurances créatives par croisement de mises en mémoire permanentes de potentielles images et éventuelles ballades dans cette Base De Données. Il s’agit d’obtenir quelques images-socles suffisamment SSS. Cette recherche se fait chaque fois en donnant du temps au temps.

Le cumul de cette recherche d’images-socles potentielles conduit à un trop-plein qu’il faut maîtriser en hiérarchisant celle qui sera le socle de celles qui seront des adjuvants. Il doit en résulter un concept SSS de tableau. Il reste à l’agencer en une composition harmonieuse. C’est en recourant aux hyper-fonctionnalités d’un logiciel pointu que ce travail se réalise (Photoshop et nombreux logiciels similaires ou complémentaires ; je pense ici par exemple aux « fractales »).. Le résultat consiste en une image Photoshop du futur tableau.

La réalisation

L’étape suivante a souvent recours à la projection vidéo sur un support soigneusement préparé pour y poser les éléments essentiels en dessin crayon. A partir de cette étape on peut poser écrit les étapes du travail de réalisation à faire comme on le fait en « ordonnancement » industriel. Décomposition en « X » zones à réaliser. Décomposition de chaque zone en « X » strates (l’équivalents des glacis du XVIII ème siècle). Des myriades de « trucs » ont été construits comme nous construisions des CMO (« concepts Modèles-Outils ») en consulting pour avoir en mémoire des voies neuves réutilisables de tableau en tableau. Peu de peintres ont posé par écrits leurs « trucs ». On mentionnera Léonard de Vinci (codex) et Caravage. Notre époque est devenue plus structurée et se prépare à l’«I.A.» (Intelligence Artificielle)…

Et à partir de là on travaille comme autrefois en esprit de qualité ; Nos grands tableaux exigent entre 300 et 400 heures de réalisation. Comme autrefois il y a des tableaux dans le tableau. Beaucoup de regards extérieurs en perçoivent sur le champ la singularité et témoignent souvent de l’émotion SSS reçue.

Des outils neufs en pose de pigments

Il a été proposé à l’observateur d’arts graphiques trois visions successives différentes. D’abord celle des peintres figuratifs (des civilisations antiques jusqu’au milieu du XIXème siècle) ; celles qui savaient faire des tableaux dans le tableau. Ensuite celle des impressionnistes figuratifs ; mais sachant s’extraire du travail des détails pour exprimer plus en grande sobriété d’exécution (plus flous). Enfin les modernes et contemporains qui, pour les plus récents, ont progressivement allégé tout, jusqu’ au vide intégral pour les plus radicaux. Les technologies, c’est à dire les techniques les plus immédiatement récentes, nous apportent de nouveaux outils.

Ces outils neufs portent sur des domaines très différents mais complémentaires. Un exposé est accessible mais serait déplacé ici. Il faudrait décrire les outils neufs en technos photographiques, logicielles (jusqu’ aux « fractales »), conception, et même retour sur les outils de pose des pigments-peinture. L’objectif global ici est de tirer parti de ces voies neuves pour obtenir ce « fou-fini » si rarement obtenu précédemment.